- Après mes études primaires dans mon village, continuais-je à la bonne franquette, je devais aller à Rabat afin de parfaire le secondaire au Lycée Moulay Youssef. Après l’obtention du baccalauréat, je fis quelques années de Droit que je ne pus terminer. Je dus quitter le banc universitaire pour subvenir aux besoins de ma famille. Une fripouille, gros ventre et responsable d’autorité, redouté et craints par les villageois, insuffla aux autorités provinciales d’aménager et de reconstruire le bourg. Il haïssait ceux qui ne sont pas issus de la région. Une discrimination notoire entre l’appartenance ou non-appartenance du village. Tout un quartier de boutiques et cafés maures furent détruits. Le siège du commerce, gagne-pain de mon père et notre maisonnette connurent le même sort. Les sinistrés ne furent guère dédommagés. Je dus quitter mes études pour subvenir aux besoins de mes parents et de mes frères et sœurs. Je trouvais un petit travail dans la capitale et priais ma famille de me rejoindre. Ce fut dur au début, mais je tins à reprendre le relais que mon père me céda malgré lui. Dieu merci, je pus mener ma mission honorablement. Mes frères et sœurs grandirent dans l’honorabilité, obtinrent des diplômes et accédèrent à l’emploi. Et je suis content d’avoir accompli mon devoir de soutien et d’assistance. Mes deux parents m’accordèrent leur bénédiction. Pour répondre à leur grâce, je prenais l’initiative de les envoyer au Hadj. Mes frères et sœurs participèrent aux frais du pèlerinage pour qu’ils bénéficient eux aussi, de la bénédiction parentale. Voilà grosso modo mon trajet de vie, dis-je pour terminer.
Elle glissa sa main droite dans ma gauche et nous marchâmes à pas retenus.
- Hé ben Abdou, tu as souffert. Une jeunesse et une vie drues. C’est une histoire poignante et trépidante à raconter dans un livre. Reste qu’après tout cela, tu es devenu un homme expérimenté. Edouard Bled disait : Quels que soient les chemins où les événements l’entraînent, l’homme reste toute sa vie l’enfant de son enfance.
- Je projette le faire le moment venu, si Dieu le veuille. Je le ferais pour moi-même, puisque je ne prétends ni à publier pour en tirer de l’argent, ni à aspirer à un prix. Ce sera un recueil englobant tous mes écrits passés, présents et futurs. Un legs qui sera confié à nos enfants.
- Et le truand du village, si je peux te poser cette question ?
- Crois moi, les villageois atteints dans leur quotidien, priaient chaque jour Le Très Haut pour le châtiment de ce chenapan. Je t’assure que quelques mois après, il fut licencié et limogé de son poste. Il sombra dans un gouffre d’amertume. Quelques jours après, il tomba malade et mourut. Toute sa richesse ne pouvait le sauver.
A suivre......