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  • Leçon de chose(épisode VII et fin)

    Salé, le 20 Fevrier 2008 à 23h de relevée.
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    - Merci mon poète et écrivassier. Depuis hier soir je pensais à te parler de la ville de Sidi-Ifni et de la tribu combattante Ait-Baamrane.  Il se peut que tu en aies besoin pour tes reportages.

      - Oui, laissons cela pour une autre fois et parlons d’autres choses. Plusieurs journalistes, écrivains et chercheurs ont vulgarisé ces sujets. Il me faut des scoops sur le social.

              A ce moment là, une dame, souriante s’approcha de notre table. Je reconnus ce visage aimable. Je répondis au sourire d’Amina. Une assistante dans une clinique à Rabat. Elle aussi de la région d’Agadir. Toute resplendissante de charme, de joie et de santé. D’une voix chaude, elle m’adressa, imitant mon salut préféré :

           -  Ah te voilà Abbèss ! Contente de te trouver dans ces lieux !

     -  Ah te voilà Amina ! Que sont mes amies devenues ! Quel bon vent t’amène ! 

     -  Je suis en congé et je revisite ce coin de paradis. J’ai aperçu ta 403 devant le restaurant, je  tenais à te dire bonjour.

       Je fis la présentation des deux dames. Enchantée l’une et l’autre se dirent-elles entre deux échanges de civilité. Elles se parlèrent en souriant.

    -    Tu es encore là, pour combien de jours, cher ami ?

    -    Non ! Je repars demain inchallah. J’ai presque terminé mon travail.

    -    Bon retour donc ! Je serais à Rabat la semaine prochaine.

    -    Soit ! Prends soins de toi. Bonjour à toute la famille, notamment à ta maman. 

       Amina demanda poliment la permission de disposer. Elle nous salua et ressortit. Jade  est  restée sans mot  dire. Je remarquai son irritation.

    -      Ah bon tu quittes demain. Tu devais m’informer au moins.

    -      Mais j’allais le faire lors de notre retour.

    -      Tu devais me le dire avant de le savoir d’une manière fortuite. Qui est cette femme ? m’apostropha Jade.

    -      Une connaissance de la capitale, répondis-je innocemment. Nous faisons des échanges de romans et revues. Elle est une grande lectrice.

    -      Humm !! Saches que cela, ne me regarde pas, dit- elle en mussant un sourire flûté.

    -      Pourquoi tu appuies sur la chanterelle Jade? Dis-je, le ton boudeur.

    -      Loin de là, ce n’est pas de l’esbroufe. Il n’y a rien entre nous deux. N’imagines surtout pas que je suis jalouse.

    -      On dirait un « saint Jean » bouche d’or, susurrai-je, le visage souriant. Mais pourquoi tu enfonces le clou ?

       Ces quiproquos embrouillèrent notre discussion. Je me demandai si c’est l’arrivée de la femme qui est à l’origine de cette jalousité ou bien mon non diplomatique, d’ouïr son récit sur Sidi-Ifni. Nous terminâmes notre dessert. Sans attendre, je fis appelle au serveur pour l’addition. Moi qui prenais un café après un bon déjeuner. Je réglai la facture et fis signe à Jade que nous quittions le restaurant. Au sortir, le serveur me remit mon manteau. 

       Lors du retour, nous ne nous échangeâmes aucun mot. Elle fredonna une chanson à peine audible, tel un murmure ’’Parlez-moi de lui’’.

    -      C’est une chanson de Dalida que tu chantonnes ? Demandai-je.

    -      Oui, mais Françoise Hardy aussi la chante dans son Album ‘’comment te dire Adieu’’. Finissant sa réplique, elle se tut et se refugia dans un épais silence. Etait-ce des paroles  insinueuses ?

      C’était la déchirure d’une amitié née, d’il y a trois jours. Un sentiment de culpabilité m’envahit. Mais je chassai cette appréhension. Des flots de pensées et soucis lancinants obsédèrent mon esprit .

    -      Les bonnes choses ne durent jamais, fit Jade interrompant le silence.

    -      Pourquoi cette réflexion ?

    -      Je me réfère à  Sand dans son dit « je crus longtemps que les transports et les jalousies de l'amour étaient inconciliables avec la divine sérénité de l'amitié, et, à l'époque où je connus Rollinat, je cherchais l'amitié sans l'amour comme un refuge et un sanctuaire où je pusse oublier l'existence de toute affection orageuse et navrante ».

    -      Je récuse cette idée. Notre amitié est fraternelle !

    -      Fais-moi l’amitié de croire que celle-ci n’existe pas entre un homme et une femme.

    -      Jade ! Tu es jeune, belle, charmante, joviale et intellectuelle. Tu travailles, tu gagnes un salaire honorifique. Heureux sera l’homme qui te prendra pour épouse. Ce n’est pas que je fuis tes sentiments. C’est un honneur pour ton ci-devant. Je suis seulement de passage, et je ne voudrais en aucun cas abuser ni de ta gentillesse, ni de ton amitié. 

      Ce dit fort au dessous de la vérité l’ébranla. Dans son œil inquisitrice, brilla une petite lumière de fierté. Elle poussa un profond soupir.

    -      Quelqu’un lèche quelqu’une, souffla –t- elle. 

    -      Non Chère amie! Ce n’est nullement une galanthommérie. Je dois te remercier Jade, pour tout ce que tu m’as fait durant ces trois jours. Disai-je pour taire sa réponse. Tu fus aimable crois moi.

    -      De rien, répondit-elle sèchement. Je dois écraser la photo prise se matin. Elle disait cela en saisissant  mon appareil  ‘’ Canon’’ mis dans la boîte à gants. 

       Elle chercha son portrait et l’arasa. Ainsi, elle effaça charme et souvenir. Lors du repas, elle m’avança qu’elle gommait tous le monde pour que je restasse seul visible.

    -      Jade, restons amis veux-tu ! 

      Sa réponse fut un long silence. Elle se dégrisait, dépitée. Je la conduisis gentiment, près de sa Mercedes, où je la déposai. Elle me serra la main de l’amitié, sans le baiser furtif.

    -      Merci pour ces randonnées. Adieu mon ami, nous ne nous reverrons peut être jamais. Mais, j’ai tes coordonnées pour te contacter.

    -      Ce n’est qu’un au revoir Jade.

      Je fus gêné aux entournures. Mais je songeai  que « Les femmes ne sont, tout compte fait que le principe antagoniste du temps, des horloges sauvages qu’il faut savoir remonter à intervalles régulier avec des clés que la nature nous a données ». Qui vivra verra!!

                                                                                           FIN

     

  • Leçon de chose(épisode VI)

    Salé, le 10 Février 2008 à 22h30 de relevée

                              

    -          Moi aussi, je ne peux être un amant, Jade. Comme l’a si bien spécifié Théophile Gautier :l'amant en un mot, est celui  dont on rêve, qu'on attend et qu'on cherche, qui doit tenir les promesses de l'idéal, réaliser la chimère des poèmes, des comédies et des romans, être la jeunesse, la passion, le bonheur, n'avoir jamais ni faim, ni soif, ni chaud, ni froid, ni peur, ni fatigue, ni maladie.Mais toujours être prêt, la nuit, le jour, à pousser des soupirs, à roucouler des déclarations, à séduire les duègnes, à soudoyer les suivantes, à grimper aux échelles, à mettre flamberge au vent en cas de rivalité ou de surprise, et cela, rasé de frais, bien frisé, avec des recherches de linge et d'habits, l'œil en coulisse, la bouche en cœur comme un héros de cire. Je ne peux m’y conformer à ces critères Jade.

        Jade a mangé goulument. Je songeai qu’une femme devant un homme n'a jamais d'appétit. Je pensai à une lecture où une femme dit à son homme,  après une lutte de corps et un combat fleuri: Tu m’as labourée comme prescrit par le coran. Son homme mangeait avec tant d’appétit pour lui dire qu’elle n’avait encore assouvie sa faim.

         Le serveur de nouveau vint débarrasser la table. Il nous servit le dessert. Le hasard voulu que celui-ci fut servi dans un service à dessert fleurs de Jade.

    -Quelle heureuse et singulière coïncidence, disais-je  plaisantant. C’est curieux. Tu es connue de ce restaurant. Tu es servie en jade.

    - Crois-moi non !dit-elle en esquissant un sourire. Sais-tu qu’au hasard de la fourchette mon nom avec le poisson a toute  une histoire ?

    - Jade et poisson ? Rétorquais-je.

    - Oui poisson et jade. Je suis née le 20 mars. Donc sous le signe de poisson, poursuivit-t-elle.

    - Je l’ai deviné lors de notre première rencontre au café « l’oriental », l’interrompant. Ce jour, je constatai que tu lisais ’’Horoscope poisson’’.

    - J’ignorai que tu m’espionnasses ce jour. Récemment, j’ai lu un article sur un conte écrit par un auteur anonyme, édité par la collection Folio.

    - Racontes le moi veux-tu. (Dans mon for intérieur, je voulais conter fleurette à cette coquette femme)

    - Et rassures-toi que ce n’est pas un conte de bonne femme, me dit-elle en gardant le sourire.

           - Je te crois, contes-y, Jade. Une femme poisson n’est jamais menteresse.

           - Ne me dit le proverbe persan  que mon père, me dit souvent, croyant une vantardise      "Tout défaut qui   plaît au Sultan est une qualité’’.

    Finissant son gâteau au chocolat blanc, elle me narra avec don le récit. Elle ne parle     jamais, la bouche pleine.

        - Selon un conte chinois du XVIIe siècle, bien sympathique. Un texte picaresque, libertin et poétique. C’est l'histoire truculente d'un jeune étudiant et d'une fille de bonne famille qui vont, en rêve, se rencontrer, se promettre en mariage et s'échanger un gage de fidélité.
    Le lendemain matin au réveil, le jeune homme aperçoit sur son coussin, l'épingle de phénix, et la jeune fille un poisson de jade échangé pendant le rêve. Pensant être soutenus par les dieux et les ancêtres et aidés par la suivante de la jeune fille, les deux "amoureux" (et la suivante) vont se voir, se revoir, aussi peu chastement que faire se peut! S'ensuit une série d'aventures dignes d'un conte voltairien.

          Que dans les brumes d'un songe s'unissent les corps et se mêlent les âmes, qu'un phénix d'or   prenne son vol divin et qu'un poisson de jade jaillisse de l'onde afin que mari et femme faits pour une union d'un siècle se trouvent en harmonie dès la première rencontre, n'est-ce pas là la marque de la convergence des volontés du Ciel?

    -      C’est fantastique, dis-je. Un rêve qui se réalise.

    Sans transition, je tire une petite boite de la poche intérieure de ma veste. Je la tends à Jade.

    -      Une étrenne pour toi Jade.

    -      Merci !dit-elle affichant un sourire pour me remercier. J’ai joie de recevoir ce présent.je voudrais t’embrasser et te donner une étrenne,  pour ta barbe rasée de frais.

      Une gaieté lascive l’embauma. Contente, heureuse, elle prit la petite boite des deux mains et l’ouvrit. Elle prit dans le creux de sa main gauche un poisson en pierre de jade. Une impulsion de sang lui fit rougir les joues.

    -Tu es un chou, charmant et verbeux.

    - Chou pour chou répliquai-je. En Lithothérapie, le Jade favorise honnêteté, justice et modestie et redonne des facultés amoureuses. Je poursuivis citant des vers  de Ducatillon :

    Vers Andromède et pierre de jade,

     Je chante pour toi l’émeraude

    Au travers de larmes chaudes.

     Je plonge dans la mer de rubis

    Dans le rouge doré de mes habits,

     Je suis ton prince maintenant préparé.

    - Merci mon poète. Depuis hier soir je pensais à te parler de la ville de Sidi-Ifni et de la tribu combattante Ait-Baamrane. Pour te donner une idée sur la région. Il se peut que tu en aies besoin pour tes reportages.

                                                                                 A suivre…

  • Leçon de chose:Sauterelle,suite V.

    720006271ecdc3517c95f6d50ee2f7e2.jpgSalé, le 05 fevrier 2008 à 22h30 de relevée.

                                          

       Je cédai la place vue sur mer à Jade. Je ne voulus interrompre sa contemplation de l’océan bleuâtre. Moi, je regardais ravi,  ses yeux bleus. Je me rappelai  la chanson de Hamdaouiya : Khaifa labhar ila yarhale ! (J'appréhende que la mer déménage : Un épris  redoute  la séparation avec sa mie aux yeux bleus). J’eus devant moi les yeux bleus de Jade, une mer calme et sereine. 

       Le restaurant était plein. En entendait une musique de schubert, jouée dans le film "trop belle pour toi».Le serveur vint demander la commande. Il nous exhiba la carte-menu, en posant des amuse-gueules.

       Lisant la carte, Jade commanda :

    - Une tulipe d'espuma d’avocats, escalope de loup en robe verte avec pomme de terre rissolées et comme dessert je prendrai un petit gâteau au chocolat blanc accompagné d'un coulis de chocolat

       A mon tour je demandai :

    -  Palmiers au caviar d'aubergines  au pistou, et cordons bleus de beryx. Pour le dessert,  j’opterai pour « le colonel » sorbet citron non arrosé de vodka.  Où plutôt  amenez-moi « le capitaine » (sorbet poire arrosé d'eau de vie de poire).

    - Et pour  boissons ? demanda le serveur.

    - Un coca-cola avec glaçons.dit Jade.

    - Pour moi ce sera, s’il vous plait, un frais jus cerès.

       Le serveur prit la commande et s’en alla.

    - Encore une nouveauté  dit-elle, affichant un large sourire. Désormais, avec vous j’apprends des choses ! C’est quoi le jus de cerès ?

    - Toujours ce "vous",nos Jades! Cerès c'est des jus de raisin, purée de goyave, jus d'ananas, purée de papaye, purée de mangue, purée de pêche et jus de la passion.

    - Tu as du talent al3afrit.Nous sommes à table maintenant, parle moi de toi.

    Cette epithete "al3afrit" m'alla droit au coeur. Moi aussi j'aime à dire 3afrita à une femme génie.Sous entendu que c'est une fée.

    - Ah oui, je m’y attendais. Mon origine est d’Imintanout. Avant de bénéficier de la retraite anticipée, j’exerçais dans un établissement semi-étatique. Mecontent, lésé  par moment  pour le clientélisme aberrent, je délaisse mon poste. Avec ma rente, je ne pouvais subvenir à mes besoins vitaux. Aimant le journalisme, je trouve un travail de reporter. J’écris des billets et reportages  pour une revue spécialisée sise dans la capitale. Je suis marié et quatre fois père. Mes enfants diplômés vaquent à leurs besognes. Voilà grosso-modo mon profil à la bonne franquette.

       Durant mon récit, Jade m’écoutait attentivement  sans m’interrompre. Ses yeux devinrent humides. Je ne savais si elle était émue. Ou seulement  par pitié !

    -      Dommage, soupira-t-elle. Changeons de sujet, le serveur arrive.

       Le serveur apporta les hors-d’œuvre avant le premier service. Je souhaitai bon appétit à mon inhabituelle commensale. Nous mangeâmes délicieusement  la kémia. Pendant qu’elle se restaurait, je regardai sa gorge bien faite. Du regard, je remontai ses seins dans un corsage, laissant bâiller une échancrure, ornée d’un pendentif. Je bayai, je rêvassai emporté dans les seins des nues. (Mer, en ton sein  garde-moi de périr. Béranger).

    -       A quoi penses-tu ? me dit-elle, me tirant de ma torpeur. Je constate que tu as l’air pensif.

    -       Je pensai au mot dommage, répondis-je, le visage cramoisi.

    -      J’aurai aimé avoir un mari comme toi. Mais, tu as une famille, que Dieu vous préserve. Toujours est-il et j’ose espérer que nous restions amis.

    -      J’espère de tout cœur être à la hauteur de tes aspirations. Je le serai cet ami fidele et dévoué.

    -      Avec grand plaisir, répondit-elle souriante et affable.

        Le serveur vint pour prendre les assiettes et nous servit le plat de résistance. Avec délicatesse, elle reprit  son nouveau couvert pour le poisson. Elle mangeât avec tact. Moi, je m’empiffrai tel un ogre. Je mangeai goulument pour lui dire que j’ai faim d’elle ! Je ne cessai de l’admirer lui récitai quatre vers de Victor Hugo :

    Quand l'homme contemple la femme,
    Quand l'amante adore l'amant,

    Quand, vaincus, ils n'ont plus dans l'âme
    Qu'un muet éblouissement !

    -      Nous ne pouvons être amant. Ta raison sociale et la mienne nous  sont incompatibles. Tu résides loin.

                                                                         A suivre….